lundi 29 octobre 2007

Madame K.

Ah! L'immense désillusion de la stagiaire qui croit en ce qu'elle fait et qui est la seule...

Evocation d’un stage professionnel… Pendant mes études de psychologie, je m’inscris en 4ème année en maîtrise de psychopathologie. Je dois suivre un stage sur l’année que je trouve dans un centre de santé mentale. Je m’y rends un jour par semaine et décide entre-temps d’interrompre mes études. Je poursuis ce stage puisque je m’y suis engagée… Je participe notamment à un « atelier marionnette » co-animé par une psychologue et une infirmière psychiatrique. Je profite de mes journées d’observation pour écouter, entre autre, les échanges informels entre patients sur ce fameux atelier. Je constate qu’une participante, Mme K., passe beaucoup de temps à tenter de mobiliser les autres contre cet atelier et qu’elle réussit peu à peu à les convaincre qu’il s’agit de les manipuler et qu’ils doivent se méfier. Un jour de débriefing avec les deux animatrices, j’accepte de prendre la parole, chose difficile pour la personne inhibée que j’étais alors. Je décide de les informer de mes observations puisque, après tout, mon rôle de stagiaire me permet de leur transmettre ce genre d’informations. Petite phrase du type, « Je crois que Mme K… ». Aucune réaction. Aucune participation à un quelconque bilan pendant trois semaines avec ces deux personnes.
Et puis un jour, je me trouve présente lors de la grosse réunion mensuelle de bilan en présence de tout le monde dont le psychiatre responsable du service. Réunion très impressionnante pour moi qui espère juste que l’on ne me demandera pas de prendre la parole. Arrive alors l’étude du cas de la fameuse Mme K. Les deux animatrices prennent la parole… « Nous sommes en difficulté avec Mme K. … Nous nous rendons compte qu’elle essaie de manipuler les participants contre l’atelier. » Et moi de me dire « Ouais, je sais, j’ai essayé de vous avertir…. » Et elles de poursuivre « Nous avons pensé pendant un temps que les difficultés étaient liées à Melle Granger (moi, donc) , qu’elle manipulait les patients contre le travail que nous faisons dans l’atelier (…) Nous nous sommes rendus compte depuis que nous nous trompions… ».
Les émotions que j’ai ressenties alors sont inoubliables, un état de stupeur suivi immédiatement de colère et d’une envie de me cacher dans un petit trou. Pour une fois que j’avais pris la parole. Ce jour-là, la réunion se passa comme si j’étais absente. On continua d’aborder le cas de Mme K. sans jamais me donner cette parole. Il m’a manqué la confiance pour souligner l’énormité de la situation et les informer qu’ils devaient arrêter de prendre des stagiaires. J’ai continué mon stage jusqu’à la fin de l’année, puisque je m’y étais engagée.

Loritza Granger

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